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7 février 2014 5 07 /02 /février /2014 10:54

Philip Seymour Hoffman nait dans l'Etat de New York en juillet 1967. Comme beaucoup d'acteurs confirmés, il s'engage très tôt dans cette voie en participant à des cours de théâtre à l'école puis en intégrant la New York State Summer School of the Arts. Il reçoit un Bachelor of Fine Arts en expression théâtrale alors qu'il a vingt-deux ans. Il commence dans le cinéma par des seconds rôles dans des films comme Triple Bogey en 1991, puis avec un personnage de plus grande importance avec My New Gun quelques mois plus tard. Son premier long métrage à disposer d'une large audience - quasi internationale dans une certaine mesure - est le drame "scolaire" (dans tous les sens du terme) Le Temps d'un week-end de Martin Brest. Il y joue l'un des jeunes étudiants qui harcèlent le héros et il se fait vertement sermonner par Al Pacino lui-même lors de son impressionnant monologue final qui lui permit d'obtenir son oscar de consolation.

Tout grand acteur a généralement son cinéaste fétiche ; celui qui va l'illuminer et le prendre comme muse : Robert De Niro puis Leonardo DiCaprio avec Martin Scorsese, Ryan Gosling avec Nicolas Winding Refn ou encore Michael Fassbender avec Steve McQueen si l'on veut citer les cas les plus récents. Hoffman fait sa rencontre capitale en 1996 avec le cinéaste Paul Thomas Anderson à l'occasion de Sydney. Ils retravailleront ensemble à quatre occasions, dont trois longs métrages. La fois suivante n'est pas plus tard que l'année d'après pour la très belle chronique du milieu pornographique seventies intitulée Boogie Nights, au cours de laquelle il cotoie Julianne Moore, Mark Walhberg ou encore Burt Reynolds. C'est sa véritable révélation au grand public, plus que sa participation mineure au Twister de Jan de Bont (que l'auteur de ces lignes porte chèrement dans son coeur !) - d'autant plus qu'Hoffman  souvent évité de s'adonner aux films de studios à de rares exceptions près.

A partir de cette date, plus rien n'arrêtera l'ascension de Philip Seymour Hoffman qui travaillera avec des noms de plus en plus réputés et exigeants. Les frères Joel et Ethan Coen d'abord pour ce monument de la comédie qu'est The Big Lebowski, dans un second rôle qui n'est pas le moins marquant de cette galerie de personnages plus barrés les uns que les autres. Todd Solondz ensuite avec Happiness, Anthony Minghella avec le sympathique remake du grand Plein Soleil avec Le Talentueux Mr Ripley, et Cameron Crowe pour Presque célèbre. Entre-temps, il alterne avec quelques blockbusters dont l'inepte thriller pour grands-mères Dragon Rouge du non moins inepte Brett Ratner dans lequel il évolue au milieu d'un casting à se damner (Anthony Hopkins, Ralph Fiennes ou encore Edward Norton) mais qui est complètement sous exploité. Cela confirme que Hoffman n'a jamais été plus à l'aise que dans les productions dites "modestes", et il faudra le Mission Impossible 3 de J.J. Abrams en 2006 pour faire mentir cette affirmation. Hoffman y incarne le mystérieux Owen Davian, le meilleur méchant de la série : un salaud fini qui parvient à terroriser Tom Cruise ( ce qui n'est pas un moindre exploit) lors d'une scène d'introduction si intense que son réalisateur ne réussit ensuite jamais à faire honneur à ce début en fanfare.

Parallèlement, il continue de travailler pour Anderson qui lui donne l'opportunité de s'illustrer dans des rôles toujours faussement secondaires dans le très émouvant Magnolia en 1999 (où il croisait déjà Cruise), puis dans le plus étrange Punch-Drunk Love trois ans après. L'année 2002 voit aussi sa participation au film acclamé de Spike Lee, La 25ème heure, et 2003 voit une nouvelle collaboration avec Minghella  pour Retour à COld Mountain qui le voit partager l'affiche avec Jude Law, Nicole Kidman et Brendan Gleeson. Mais l'heure de la consécration approche. Deux ns plus tard, Hoffman foudroie le monde des cinéphiles et de la critique en devenant un Truman Capote plus vrai que nature dans le long métrage éponyme de Bennett Miller. Sa transformation mimétique dans la peau du célèbre écrivain américain qui oeuvra notamment au cours des années 1960 échappe, de par sa justesse et son intelligence, aux scories agaçantes et "clichées" des performances que l'on a habituellement dans les "biopics" prestigieux. Hoffman obtient l'Oscar et le Golden Globe du Meilleur Acteur au début de 2006.

L'année d'après, il tient l'un des rôles principaux dans 7h58 ce samedi-là, le film testament du cinéaste de génie Sydney Lumet (Douze Hommes en colère, Serpico, Un après-midi de chien,...), véritable icône de l'époque du Nouvel Hollywood, avant d'enchainer avec La Guerre selon Charie Wilson de Mike Nichols (Le Lauréat), soit une autre immense figure de cette même période. Parmi ses longs métrages plus récents, on peut mentionner Synecdoque, New York de Charlie Kaufman en 2008, la très jouissive comédie "brtish" Good Morning England de Richard Curtis en 2009 dans un mémorable personnade d'animateur radiophonique américain surnommé le "Comte", Les Marches du pouvoir de George Clooney et Le Stratège de Miller en 2011. Quelques mois plus tard, il retrouve son comparse Paul Thomas Anderson qui va lui offrir son personnage le plus emblématique dans The Master. Injustement éclipsé par le retour cabotin de son comparse Joaquim Phoenix, sa prestation en gourou manipulateur et pathétique est de loin la plus subtile et la plus fascinante qu'il ait pu livrer à ce jour ("L'Ecran Masqué" l'avait mentionné il y a un mois dans son article faisant le bilan de 2013). Avec ce long métrage, Hoffman atteint l'apogée de sa carrière. Le monde du cinéma s'offre à lui et il a encore tant à nous donner.

Pourtant, nous ne saurons pas ce que Hoffman aurait accompli ces prochaines années. Nous ne pouvons plus qu'imaginer les rôles qu'il aurait pu avoir et dans lesquels il aurait brillé, car Hoffman est décédé des suites d'une overdose, à New York, ce 2 février dernier. Une nouvelle inattendue, bien que l'acteur avait révélé avoir souffert d'addictions pendant ses jeunes années. En l'état, sa dernière apparition s'est faite dans le blockbuster Hunger Games 2 de Francis Lawrence que la critique a, dans l'ensemble, désignée comme assez "inconsistante", surtout par rapport à son parcours et à l'implication du reste du casting. Mais ce ne sera heureusement pas sa dernière partition et l'acteur ne devrait pas conclure sa trop brève carrière sur une note en demi-teinte. Cette année, il reviendra sur "Terre" le temps d'un film : Un homme très recherché d'Anton Corbjin, dont les futures projections risquent de prendre une sinistre résonnance à présent.

Il y a peu, la dernière véritable tragédie dans l'Histoire du Cinéma était, non pas la 3D, l'arrivée du numérique ou la soit-disant soudaine omniprésence des reboot-remakes comme le sous-entendraient les pseudos-admirateurs du 7ème art, mais la mort trop précoce du génialissime réalisateur de films d'animation japonais Satoshi Kon (Perfect Blue, Millenium Actress, Paprika). La mort beaucoup trop précoce du "Maître" Philip Seymour Hoffman, à 46 ans et laissant trois enfants, vient malheureusement de lui succéder. 

 
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