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4 juin 2011 6 04 /06 /juin /2011 00:03

                                               

 - Titre original : La Conquête

 - Film français sorti le 18 mai 2011

 - Réalisé par Xavier Durringer

 - Avec Denis Podalydès, Florence Pernel, Bernard Le Coq,…

 - Comédie dramatique, Thriller, Biopic

                 Le 6 mai 2007, alors que les Français s'apprêtent à élire leur nouveau chef de l'Etat durant le second tour de l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy, sûr de sa victoire, reste cloîtré chez lui, en peignoir, sombre et abattu. Toute la journée, il cherche à joindre Cécilia qui le fuit. Les cinq années qui viennent de s'écouler défilent : elles racontent l'irrésistible ascension de Sarkozy, semée de coups tordus, de coups de gueule et d'affrontements en coulisse. C'est l'histoire d'un homme qui gagne le pouvoir et perd sa femme...

Bernard Le Coq et Denis Podalydès. Emilie de la Hosseraye / Mandarin Cinema - Gaumont 2011Florence Pernel et Denis Podalydès. Emilie de la Hosseraye / Mandarin Cinema - Gaumont 2011

            Contrairement aux américains qui tentent d'exorciser au plus vite leurs « traumatismes » sur le grand écran, les Français se montrent beaucoup plus prudents dans ce qui est d'aborder des phénomènes de sociétés qui fâchent, qui plus est quand ils sont relativement récents. L'annonce du nouveau film de Xavier Durringer sur l'ascension au pouvoir de l'actuel président de la République, Nicolas Sarkozy, ne pouvait de ce fait qu'être alléchante. Peut-être est-ce alors à cause des attentes démesurées que l'on avait mises dedans qui amènent le film à être une amère déception.  

            Avec un tel sujet, La Conquête aurait dû faire l'effet d'une « bombe » cinématographique et aurait dû se montrer artistiquement à la hauteur pour marquer le coup. Hélas, la mise en scène est à peine au niveau d'un téléfilm, Durringer ayant visiblement préféré faire du « théâtre filmé », là où il aurait été plus judicieux d'y mettre du rythme et de l'audace. On peut néanmoins nuancer sa responsabilité dans cet échec car il semble avoir été bien limité par son « petit » budget. Cela donne par exemple des séquences surréalistes où, pour faire croire qu'il y a dix milles personnes dans une salle, on n'en filme que trente au premier plan (et on rajoute les bruits d'une foule en délire). Le film est souvent composé de plans fixes alors que le centre même du film est le portrait d'un homme hyperactif. Ou comment montrer que l'on n'a pas eu les moyens de ses ambitions. Aucune séquence n'est marquante, la photographie est dénuée d'originalité et il n'y a aucun effet de montage singulier. La structure du récit est elle-même très lourde puisqu'elle est composée de « flashbacks » entre cette journée du 6 mai, où la probable absence de l'épouse du président au bureau de vote fait office de « suspense », et tout le parcours qui a précédé.  

            Structure donc affreusement classique qui n'est pas aidée par le scénario de Patrick Rotman ; et s'il y avait un bien un point qui était très attendu dans La Conquête c'était bien celui-là. Hormis quelques piques bien senties et efficaces (dont une comparaison assez cocasse faite par Sarkozy entre Dominique de Villepin sortant de l'eau et Ursula Andress dans la scène mythique du premier James Bond ; allusion trop populaire qui déplait au premier ministre de l'époque amenant Sarkozy à faire une analogie plus « noble » avec « le dieu grec qui était beau »). Mais dans l'ensemble, la plupart de ces phrases assassines sont déjà connues. Le film en lui-même ne révèle rien de nouveau, une page « Wikipédia » étant presque aussi instructive sur cette période et ces personnages. Certains points ou affaires sont presque mis aux oubliettes comme l'affaire Clearstream qui doit se contenter de cinq petites minutes. Le problème vient peut-être aussi de la surmédiatisation hexagonale de tous ces évènements qui font que la plupart des Français les connaissent déjà ; le film pourrait alors mieux fonctionner sur le marché étranger car ce dernier est moins au courant de ceux-ci.  

            Le film doit aussi faire face à un autre dilemme. Le sujet étant bien contemporain, l'équipe de La Conquête semble avoir eu peur de prendre parti. En effet, fallait-il céder à la critique facile ou tomber dans l'apologie, amenant les réfractaires à hurler à la propagande, une année avant l'élection présidentielle (car c'est bien connu, les Français n'ont pas assez de maturité intellectuelle et peuvent se faire influencer par un film des mois auparavant) ? Le résultat transparait dès les premières secondes avec la phrase « même basé sur des faits-réels, ce film reste avant tout une fiction ». Il n'y a pas encore eu de meilleur moyen pour dire que l'on a reculé devant l'obstacle, effrayé par l'importance et la difficulté du projet. S'ajoute à cela une des pires bandes originales composées ces dernières années. C'est simple, il n'y a que deux morceaux grand guignolesques qui sont répétés bruyamment et « ad nauseam » pendant au moins une séquence sur deux. Le compositeur Nicola Piovani fait même sortir les grands violons lors de la séparation entre Nicolas Sarkozy et Cécilia, laissant le spectateur assez perplexe sur la réaction qu'il doit avoir (est-ce une note d'humour ? De l'idiotie complète ?).  

            L'interprétation des acteurs est néanmoins révélatrice de la réelle ambition de La Conquête. L'objectif n'était visiblement pas de faire un film réaliste, cruel et sans concession du monde politique actuel, de ses rapports aux médias et au reste de la population. Non, la volonté de l'équipe semble d'avoir essayé de faire une version « live » des « Guignols de l'info », mais bien moins drôle encore que ceux d'aujourd'hui. Les acteurs sont aux diapasons avec cette idée et se plonge plus dans l'imitation que l'interprétation. Cependant, et de manière inattendue, cela fonctionne assez bien, le film prenant alors des airs de jeux de massacres réjouissant. Mais c'est bien pauvre pour satisfaire les attentes. Denis Podalydès livre une prestation plutôt convaincante (d'autant plus que le choix de cet acteur pour ce rôle n'était pas le plus évident), Samuel Labarthe est crédible en Dominique de Villepin et Bernard Le Coq est même impressionnant en Jacques Chirac. Mais face à ces « caricatures volontaires », Florence Pernel qui incarne Cecilia se montre plus sensible, sobre et donc plus en retrait alors que son rôle est crucial. Les personnages secondaires sont par contre très anecdotiques, voire même embarrassant dans le cas de Pierre Charon interprété par Dominique Besnehard.  

            Au lieu d'avoir un film sérieux et riche (comme les américains ont réussi à le faire avec quelques perles comme JFK d'Oliver Stone ou Les Hommes du Président d'Alan J. Pakula) on se retrouve avec une gentille comédie française comme on en produit des dizaines chaque année. Une comédie teintée de drame puisque le film ne raconte que l'histoire d'un politicien ambitieux qui perdra sa femme une fois à la plus haute fonction d'état, cela permettant ainsi d'humaniser un personnage aussi « extrême » et « haut en couleurs » que Sarkozy. On peut aussi y voir quelques rivalités assez tendues mais connues de tous, permettant alors l'élaboration de quelques coups tordus et trahisons. Une déchéance inéluctable (celle de Chirac) et une ascension fulgurante en parallèle (celle du "nain" qu'il n'arrivera jamais à controler). Une peu de bling-bling et de grossiereté pour faire politiquement incorrect. Et c'est tout. Seule « anomalie » donc à cette comédie : un sujet au départ audacieux. Sur un thème contemporain, on avait eu récemment de l'autre côté de l'Atlantique The Social Network qui analysait parfaitement, sous toutes ses coutures et de façon plutôt objective le phénomène de société contemporain qu'était « Facebook ». Le film avait lui-même été accusé d'opportunisme de longs mois avant sa sortie. Mais visiblement tout le monde ne peut pas être Sorkin ou Fincher. Reste le fait que La Conquête a (ré)ouvert une brèche qui, on peut toujours rêver, permettra la production d'oeuvres françaises traitant de sujets plus actuels et osant aborder de nouveau et sans crainte des domaines comme la politique.  

NOTE à 4,5 / 10      

Mathias Mlekuz (Franck Louvrier), Dominique Besnehard (Pierre Charon), Florence Pernel (Cécilia Sarkozy), Denis Podalydès (Nicolas Sarkozy), Yann Babilee Keogh (Richard Attias), Pierre Cassignard (Frédéric Lefebvre), Grégory Fitoussi (Laurent Solly). Emilie de la Hosseraye / Mandarin Cinema - Gaumont 2011Florence Pernel & Denis Podalydès. Emilie de la Hosseraye / Mandarin Cinema - Gaumont 2011

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commentaires

J
Ouais, enfin, en fait, il déconne vachement, y a encore du boulot...
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K
Ah bah parfait ! J'attend donc de toi une participation encore plus active !
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J
Alala... Et dire que j'ai accès à Internet dans ma chambre maintenant...
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