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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 21:20
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Titre original : Men in Black 3

Film américain sorti 23 mai 2012

Réalisé par Barry Sonnenfeld

Avec Will Smith, Tommy Lee Jones, Josh Brolin,…

Comédie, Action, Science-fiction

Un certain Boris voyage dans le temps afin de tuer l'agent K, ce qui déclenchera la fin du monde. L'agent J est donc contraint de retourner dans les années 1960 pour y retrouver l'agent K...

      

Des suites, toujours des suites. Ce phénomène classique d’Hollywood, bien plus vieux qu’il n’est pourtant politiquement correct de le penser, est un business actuellement en plein boom. Dès qu’un long-métrage marche ou qu’il a le potentiel pour, on fait directement signer un contrat liant le metteur en scène et les acteurs à un probable deuxième voire troisième opus. Ces contrats sont même parfois une des conditions nécessaires pour pouvoir participer à un blockbuster. Dernièrement, c’est le troisième épisode longtemps attendu de Men in Black qui vient pointer le bout de son nez.

Petit rappel nécessaire : le premier épisode était censé être un « one shot » (un seul coup), un film que le studio Columbia ne voyait pas spécialement cartonner en salles et qui eut une sacrée surprise lorsqu’il reçut les premiers chiffres du box office dévoilant les résultats impressionnants de cette « petite » production. Mais le film de Barry Sonnenfeld avait pour lui une écriture assez travaillé et un visuel ainsi qu’un univers riches et attrayants. Il y avait en plus un duo d’acteurs qui fonctionnait parfaitement malgré une association inattendue et dont la finalité dévoilait une idée somme toute assez touchante où un WASP vieillissant (Tommy Lee Jones) trouvait comme digne successeur un jeune Afro-américain (Will Smith). Une idée pertinente sur cette ancienne Amérique blanche et pulp des années 50-60 qui laissait sa place à une nouvelle Amérique plus métissée et dynamique ; une morale semblable à la conclusion du Gran Torino de Clint Eastwood où le républicain régulièrement qualifié de « facho » faisait un ultime pied de nez en dévoilant qu’il léguait consciemment et avec joie son héritage à un jeune Asiatique issu de l’immigration.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/86/70/90/20076785.jpgBazar temporel

Or un tel succès ne pouvait rester longtemps impuni : les dieux d’Hollywood décidèrent de lui attacher une suite, condamnant ainsi l’inventif film de S.F. à voir son concept répété jusqu’à la moelle et son message complètement dévoyé. Le problème de Men in Black dans le cadre d’une suite, c’est qu’il sacrifiait à la fin ce qui contribuait en partie à son succès : l’alchimie entre les complètement opposés Jones et Smith qui se séparaient lors des dernières minutes du long-métrage. Comment faire alors un second épisode sans prendre le risque d’introduire un nouveau personnage qui n’est pas garanti de rencontrer un succès certain auprès du public ? C’est ainsi qu’on ramena le vieil agent K (Jones) à la raison et ce, même si la finalité de Men in Black était justement de permettre son départ. Faisant comme si le un n’avait presque jamais existé, Men in Black 2 adoptait une structure narrative inverse destinée à faire un gigantesque pas en arrière tout en se finissant de la façon que le premier film avait refusé.

Après la réussite financière assez relative du deuxième épisode, le chantier d’un troisième opus prit sensiblement plus de temps. C’est près de quatorze ans après la première aventure que le fameux duo de costards-cravates à lunettes noires façon FBI revient pour la troisième fois. Et ce devrait être la dernière, vu la production catastrophique de ce blockbuster et les réceptions critiques et publiques assez indifférentes. Après avoir validé un script ayant pour thème central le voyage dans le temps, la production s’est soudain rendue compte en plein tournage que les rapports entre les évènements passés et présents ne concordaient pas et que toute la structure narrative ne tenait pas (l’éternel problème des voyages spatiotemporels). Arrêt de la production pour plusieurs mois le temps qu’une flopée de scénaristes tente de sauver les meubles en raccordant les divers morceaux tout en se débrouillant avec ce qui avait déjà été filmé.

Résultat : le budget a explosé, dépassant les 370 millions de dollars en comptant la campagne marketing, soit à peu près autant que la dernière méga production de James Cameron. Angoisse bien compréhensible au studio Columbia sachant qu’il faudrait faire le double au box office pour commencer à toucher des bénéfices. Autant dire que si par miracle MIB 3 y parvient, il ne devrait y avoir que quelques miettes à grappiller. Tout ça pour ça. C’est un peu la réflexion parfaite que l’on peut se faire en voyant le film de Sonnenfeld. La production de ce long-métrage a été tellement douloureuse et chaotique que rien de bon ne pouvait en sortir. Le film a trop longtemps trainé. Men in Black 3 est exactement comme Indiana Jones 4. Un fantasme longtemps alimenté, attendu, mais tellement repoussé et remanié que le produit final ressemble à un gloubi-boulga d’idées parfois pas forcément idiotes mais jamais agencées ou emboitées.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/86/70/90/20000149.jpgAbsence

A ce titre la première demi-heure est à la fois déprimante et parfaitement représentative du problème. Trente minutes de vagues péripéties consternantes qui essayent de refaire comme dans les épisodes précédents mais qui n’arrivent pourtant jamais à convaincre. Danny Elfman a beau répéter à plusieurs reprises son (excellent) thème musical, ici légèrement remanié, on n’y croit plus. La mise en scène est régulièrement statique et n’utilise que très occasionnellement le procédé de la 3D pour en faire quelque chose de ludique (à l’exception notable de la chouette séquence du saut dans le vide). Certains effets spéciaux sont assez embarrassants pour une production de cette envergure et surtout de cette époque. La direction artistique ne surprend plus et les décors sont régulièrement d’une non-inventivité assez folle. Là où dans MIB 1 et 2 des détails débordaient carrément du cadre, ici tout semble vide, cheap et la fameuse agence parait limitée à une vingtaine d’agents au maximum.

Le fait est que les anciens personnages secondaires, qui faisaient entre autre le sel des deux épisodes précédents, ne reviennent pas. Le chien parlant n’apparait que sur une photo, les vermisseaux n’apparaissent qu’une fois en arrière-plan, l’extraterrestre à tête repoussante disparait purement et simplement (le personnage comique de Michael Stuhlbarg a la charge de tous les remplacer) tandis que le directeur du MIB est remplacé par Emma Thompson. Cette grande actrice n’a évidemment que cinq minutes de temps de présence à l’écran mais c’est déjà beaucoup trop pour ce qu’elle fait (un discours en langue extraterrestre tout juste digne d’un enfant de maternelle).

Absence aussi bien regrettable d’un méchant d‘envergure. Si Vincent d’Onofrio avait livré une interprétation assez jubilatoire dans la première aventure et que Lara Flynn Boyle avait composé un personnage assez pervers (son impressionnante plastique n’étant pas étrangère à son impact « rétinien »), Jemaine Clement peine à marquer les esprits. Là où les deux précédents méchants, derrière leurs « déguisements » d’humains, finissaient par dévoiler une nature beaucoup plus angoissante, monstrueuse et gigantesque, le méchant de MIB 3 ne reste en fin de compte qu’un humanoïde lançant des dards de l’une de ses mains. D’autant plus que malgré sa voix grave censée faire peur, il est plutôt idiot et pas très charismatique. On a bien du mal à voir en quoi il constitue une réelle menace pour l’agent K, censé être le plus doué de toute l’agence. Il manque aussi un réel protagoniste féminin comme dans les épisodes précédents, surtout que le personnage d’Emma Thompson (y compris quand elle est plus jeune) ne remplit pas cet office. A la place, on donne du temps de présence à un personnage geek rondouillard incroyablement crispant  et mal écrit.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/86/70/90/20086544.jpgLier n’est pas jouer

On en vient donc au « trio » principal. Evacuons rapidement Tommy Lee Jones qui vient ici pour cachetonner et doit être intérieurement bien content de n’avoir que vingt minutes à jouer. On ne pourra au moins pas lui enlever qu’il est en complète cohérence avec son personnage puisque les scénaristes ont eu l’idée d’amplifier encore plus son caractère bougon et peu expressif (à ce niveau, Jones ferait ainsi presque du « méta-jeu »). Will Smith, trois ans après son dernier long-métrage, n’a pas changé d’un iota. Ceux qui l’aimaient l’aimeront encore tandis que ceux qui ne supportaient pas son habituel jeu outrancier « comico-cool » ne risquent pas de se réconcilier avec lui cette fois. Au moins peut-on dire qu’il apparait comme un peu plus concerné pendant le dernier quart d’heure qui, comme on va le voir, renferme la seule grande idée du long-métrage.

La vraie surprise vient d’un Josh Brolin qui enchaine malheureusement les projets pour la plupart idiots. Son interprétation de K/Tommy Lee Jones en plus jeune est assez effarante tant elle est réussie. Cela permet ainsi de redynamiser quelques peu le duo d’acteurs en apportant du sang neuf tout en conservant une absence de prise de risque puisque ce nouveau personnage est en fait exactement le même que jouait Jones dans le premier épisode. MIB 3 a beau se vendre comme le film qui révèlera pourquoi le personnage de K est si triste, la version de Brolin ne sourit quasiment jamais auparavant et on a donc bien du mal à voir qu’est-ce qui a changé après coup (comme si Jones ne souriait pas dans les précédents épisodes !).

Car on en vient à la grande idée « poudre aux yeux » de ce troisième opus : sans trop en révéler, disons que cet évènement traumatisant concerne en fait les deux personnages principaux, cédant alors à l’idée crétine du « tout est lié depuis le début ». Si on ne peut enlever que le dernier quart d’heure, se déroulant au cours du lancement de la célèbre fusée Apollo 11 vers la Lune, ressemble enfin à un épisode dynamique de MIB (avec quelques bonnes idées en prime), il annihile toute la logique des personnages établis dès le premier film. Ainsi donc, tout était prévu. La tristesse du K dans le premier épisode ne venait pas de cette fameuse femme qu’il avait laissé pour s’engager et disparaitre dans le « néant » ; personnage d’ailleurs qui a lui-même purement et simplement disparu tant il empêchait justement K de revenir dans les suites. K ne s’était pas reconnu dans le futur J mais avait agit comme s’il avait une dette à payer. Un acte totalement « logique » aux yeux des scénaristes, sauf qu’il apparait assez saugrenu voire cruel une fois qu’on connait ce secret (qu’on voit venir dès la dixième minute tant cela est amené avec subtilité) que K ait décidé de faire couper définitivement tout lien familiaux à J.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/89/36/03/20072344.jpgPoint de non-retour

Un exemple de plus de la non-cohérence scénaristique de cet opus qui a tellement accumulé de plumes que le film part dans tous les sens sans aucune logique (l’histoire spatiotemporelle a bien du mal à voir ses fameux trous comblés), aux enjeux parfois incompréhensibles et brouillons. On envoie un Noir en pleine période de lutte pour les Droits civiques ? N’utilisons cette idée que lors de deux scénettes absolument inutiles dans la narration. Et si on faisait croire que le personnage d’Emma Thompson avait une importance dans le passé de K alors que non en fait, rendant ainsi cette sous-intrigue parfaitement inutile ? Et si tous les hippies et célébrités 70s étaient des extraterrestres ? Qu’est-ce que ce gimmick référentiel serait tordant. Et si cette menace ultime qu’est l’annihilation de la Terre n’était montrée qu’en arrière plan de deux ou trois images, histoire de ne pas du tout appuyer sur l’urgence de la situation ?

Bref, il s’agit clairement de l’épisode de trop qui permet en plus de revaloriser la seconde aventure pourtant très loin d’être dénuée de défauts. Il n’y a pour cela qu’à voir la misère du bestiaire extraterrestre et la platitude des séquences d’actions introductives (qu’on compare ne serait-ce que la séquence du métro de MIB 2 avec la consternante bagarre dans le restaurant chinois pour bien prendre en compte la mesure du problème). Sans intérêt, mal foutu, mal écrit et dénué de rythme, MIB 3 est un carnage qui confirme encore une fois que le blockbuster américain, en 2012, c’est plus trop ça. Il va devenir urgent qu’Hollywood se rende compte qu’une refonte totale de son système est nécessaire si elle ne veut pas couler sous les gros budgets pompeux et vides comme ce fut le cas à la fin des années 60.

NOTE :  2,5 / 10

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