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31 juillet 2012 2 31 /07 /juillet /2012 22:33

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/89/51/41/20130887.jpg

Titre original : Rock Forever

Film américain sorti le 11 juillet 2012

Réalisé par Adam Shankman

Avec Tom Cruise, Malin Akerman, Alec Baldwin,…

Comédie musicale, Comédie dramatique

Sherrie, jeune provinciale, rencontre Drew, garçon de la ville, sur le Sunset Strip, alors qu'ils tentent de percer à Hollywood. Leur histoire d'amour est racontée à travers les tubes de Def Leppard, Foreigner, Journey, Poison, REO Speedwagon, et Twisted Sister...

     

L’unique intérêt de la comédie musicale Rock Forever d’Adam Shankman réside dans sa star Tom Cruise. Tout le reste est d’une consensualité et d’une pâleur qui ferait envie à un mort. Il faut dire que cette production enquille des défauts plus ou moins embarrassants. Pourtant, aux prémices du projet, celui-ci pouvait faire croire qu’il avait le potentiel d’un film à oscars. Adapté d’un grand succès de Broadway, Rock Forever cumulait ainsi plusieurs avantages vendeurs dont le moins négligeable était d’être tout bonnement une comédie musicale, genre cinématographique hollywoodien par excellence qui a toujours eu une position privilégiée dans les grandes cérémonies fastueuses à récompenses (le récent The Artist vient encore de nous le prouver cette année). Le casting réuni, mêlant têtes d’affiches et jeunes premiers inconnus, parvenait aussi à faire illusion.

On allait avoir droit à un grand spectacle dynamique plein de paillettes, d’humour et de romanesque. Comme le promettait le Nine de Rob Marshall il y a deux ans. Et comme Nine, Rock Forever surprend par l’extrême superficialité, qu’on croirait presque voulu, qui enveloppe le long-métrage. Et on finit par se demander, assez penaud et vexé, comment on a pu croire une seule seconde qu’un tel projet puisse avoir le potentiel pour être un grand film. Le résultat qui apparait à l’écran est à la fois d’une telle vulgarité et d’un tel inintérêt que l’on a du mal à comprendre comment un film ayant sous le coude quelques promesses intéressantes ne puisse qu’accoucher d’une œuvre dont même le caractère divertissant reste extrêmement relatif. Un Showgirls consensuel et fait au premier degré en somme.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/83/17/53/20123950.jpgDécadence

Commençons donc par bazarder tous ce qui plombe, et le mot est faible, le long-métrage d’Adam Shankman à qui l’on devait déjà le très peu intéressant Hairspray. Le scénario d’abord qui n’est que l’énième redite d’une « success story » foncièrement matérialiste faisant malgré tout croire à son public que l’amour, plus important que tout, triomphe face à n’importe quel obstacle (sans que cela ne gène de toute façon la réussite financière des deux jeunes tourtereaux). On voit tout venir à des kilomètres comme s’il s’agissait de la plus éculée des « rom-com » pour « teenagers » écervelés. Les deux jeunes acteurs principaux n’aident d’ailleurs pas à faire passer la pilule tant ils représentent l’archétype des minets et midinettes que l’on a envie de baffer tellement ils ont l’air (et sont de fait) niais.

Pourtant ils ne s’humilient pas dans un surjeu embarrassant. Car leurs co-stars tâchent tant bien que mal de leur voler la vedette. Un paquet de célébrités un peu has-been qui essayent de ternir (comprendre de rendre plus « cools », moins « vieillottes ») leurs images. Il y a Paul Giamatti, vu récemment dans Cosmopolis de David Cronenberg, qui nous ressert sa voix grave et inquiétante afin de composer un méchant agent artistique véreux. Il y a aussi Alec Baldwin interprétant un personnage qui compose, avec celui incarné par Russell Brand, un duo assez inutile dont la romance homosexuelle n’est là que pour faire croire que Rock Forever est une production décomplexée. Il y a surtout Catherine Zeta-Jones dont le sex-appeal vient de prendre un coup définitif. Pas charismatique pour un sou, crispante au possible en couguar républicaine refaite au bistouri, même si on peut arguer que c’est le rôle qui veut ça, Zeta-Jones essaye, vaguement semble-t-il, de réitérer le coup du Chicago de Rob Marshall qui lui avait valu un oscar en se lançant dans une sorte de numéro comico-sexy des plus embarrassants.

Et puis il y a tous les autres : Malin Akerman, ex-super-héroïne aguicheuse dans le Watchmen de Zack Snyder, à qui l’on a attribué ici le rôle d’une journaliste potiche et accessoire ; l’excellent Brian Cranston réduit à n’être que le faire-valoir de Catherine Zeta-Jones, un républicain élu se prenant des fessées par sa secrétaire-maîtresse tout en étant soumis à son hystérique de femme (un rôle qui se rapprocherait presqu’au passage à celui de « figurant ») ;… A cela il faut aussi ajouter une photographie régulièrement hideuse qui peine à enjoliver des chorégraphies dans l’ensemble très pauvres et des décors et costumes complètement caricaturaux.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/83/17/53/20123945.jpgPrêt-à-mâcher

Pour cela, il n’y a qu’à voir le passage consternant où le jeune héros, aspirant à devenir un vrai rockeur, vend tous ses principes et ses rêves sur l’autel de la gloire en devenant le chef d’un « boys band » sous l’influence maléfique de l’agent-Giamatti car c’est « ce qui marche à présent ». Cette critique du « prêt-à-mâcher » serait attendrissante si tout le reste de la bande son était réellement au-dessus de cette bouillie musicale moquée. Sauf que la bande originale n’a régulièrement de « rock and roll » que l’emploi d’une guitare électrique ; des morceaux préexistants repris à la sauce électronique auxquels on a rajouté les voix, probablement un peu modifiées, des acteurs chantant eux-aussi en playback. Un comble.

Péché capital s’il en est pour toute comédie musicale. Ne jamais délaisser la bande son car c’est souvent elle, plus que les acteurs ou l’histoire racontée, qui fait pour le coup le succès du long-métrage. Le montage n’élève jamais les morceaux musicaux, pourtant nombreux, au point que ceux-ci sont très oubliables. En l’état, rien ne semble pouvoir sauver ce pur produit mercantile qu’est Rock Forever : une compilation ringarde de tous les clichés sur le rock mélangée à du sentimentalisme américain du plus mauvais goût. Pourtant le long-métrage de Shankman s’élève au cours de plusieurs séquences en dévoilant une ironie et une mise en abime, probablement involontaire sauf pour l’acteur concerné, lorsque la méga-star Tom Cruise apparait à l’écran. 

Ce n’est pas la première fois que Tom Cruise devient l’intérêt principal d’un long-métrage. Cela était déjà le cas de Knight and Day, banal film d’action s’il n’y avait pas eu la star mégalo dans le rôle-titre. Dans ce dernier, Cruise démolissait l’image d’agent secret héroïque qui ne vieillit jamais qu’il avait pourtant largement contribué à bâtir avec Ethan Hunt dans sa série Mission : Impossible (cette dernière étant un peu conçue comme étant un moyen de substitution pour Cruise de jouer James Bond). Il affublait au héros bellâtre un sérieux grain ainsi que des parents attachants, rappelant soudain que ce super-héros ne l’avait pas toujours été.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/83/17/53/20123957.jpgStacee Cruise

Le rôle de Cruise dans Rock Forever, une méga-star du rock à l’aura (sexuelle) si disproportionnée qu’il est perçu et agit comme le gourou d’une secte, rappellera à tort son incroyable performance dans Magnolia de Paul Thomas Anderson où il incarnait le porte-parole hypersexué et ultra charismatique d’une philosophie machiste et vulgaire peinant à cacher de très profondes blessures enfantines. La visée de ce choix de rôle pour Tom Cruise semble en fait plus proche de celle qu’il avait lorsqu’il interpréta ce gros producteur américain chauve et vulgaire dans Tonnerre sous les Tropiques. Une ambition comique et autocritique qu’on était loin de soupçonner chez la star il y a encore quelques années. Découverte tardive d’une vocation ou réalisation que le temps ne cesse d’avancer ?

Peu importe au final car Cruise veut rire de lui-même et faire rire les autres. Dévoiler qu’il n’est pas si inatteignable. Montrer qu’il n’est pas (que) cette figure phare propagatrice et inquiétante de la secte de la scientologie. Chaque scène de Rock Forever ne dessert un autre but que celui d’humilier complètement un Tom Cruise déchainé qui n’hésite pas à dévoiler sa monstrueuse musculature alors qu’il vient de dépasser la cinquantaine. Si Rock Forever constitue sans mal l’un des pires films de sa filmographie, il n’en révèle pas moins que l’acteur commence à retrouver la forme après sa longue traversée du désert post-La Guerre des Mondes et ses sauts de cabris sur le canapé d’Oprah Winfrey. Après avoir cassé son image dans Tonnerre sous les Tropiques, Knight and Day et avoir retrouvé les honneurs du box office avec le quatrième Mission Impossible réalisé par Brad Bird, Cruise est fin prêt à reconquérir son titre de « roi incontesté d’Hollywood ».

Apparaissant en string de cuir au milieu de trois donzelles en petite tenue, complètement allumé, faisant l’amour passionnément sous une pluie de préservatif, parlant à un singe et se déchainant complètement en sueur sur scène, Tom Cruise est à la fois méconnaissable et complètement évident. Car cette immense star qui a vendu ses rêves sur l’autel du mensonge et de l’argent mais qui est en quête d’une rédemption salvatrice à la fois artistique et sentimentale, c’est au fond Cruise lui-même. Et Tom Cruise n’a jamais été aussi bon que dans des rôles étant des extrapolations de lui-même, de sa mégalomanie, des fantasmes exacerbés qu’il engendre ou encore de son charisme inné. Des rôles lui obligeant à ternir cette image d’une jeunesse infinie pourtant pas si éternelle. Reste encore à déterminer si Cruise saura tourner sa carrière dans la bonne direction. Connaissant son intelligence dans les affaires et sa nature kamikaze, nul doute qu’il saura faire les bons choix et se salir les mains.

NOTE :  4,5 / 10

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