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28 juin 2012 4 28 /06 /juin /2012 20:38
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Titre original : The Dictator

Film américain sorti le 20 juin 2012

Réalisé par Larry Charles

Avec Sacha Baron Cohen, Anna Faris, Ben Kingsley,…

Comédie

Isolée, mais riche en ressources pétrolières, la République du Wadiya, en Afrique du Nord, est dirigée d’une main de fer par l’Amiral Général Aladeen. Vouant une haine farouche à l’Occident, le dictateur a été nommé Leader Suprême à l’âge de 6 ans, après la mort prématurée de son père, tué dans un accident de chasse par 97 balles perdues et une grenade ! Depuis son accession au pouvoir absolu, Aladeen se fie aux conseils d’Oncle Tamir, à la fois Chef de la Police Secrète, Chef de la Sécurité et Pourvoyeur de Femmes. Malheureusement pour Aladeen et ses conseillers, les pays occidentaux commencent à s’intéresser de près à Wadiya et les Nations Unies ont fréquemment sanctionné le pays depuis une dizaine d’années. Pour autant, le dictateur n’est pas du tout disposé à autoriser l’accès de ses installations d’armes secrètes à un inspecteur du Conseil de Sécurité – sinon à quoi bon fabriquer des armes secrètes ? Mais lorsqu’un énième sosie du Leader Suprême est tué dans un attentat, Tamir parvient à convaincre Aladeen de se rendre à New York pour répondre aux questions de l’ONU. C’est ainsi que le dictateur, accompagné de Tamir et de ses plus proches conseillers, débarquent à New York, où ils reçoivent un accueil des plus tièdes. Il faut dire que la ville compte une importante communauté de réfugiés wadiyens qui rêvent de voir leur pays libéré du joug despotique d’Aladeen. Mais bien plus que des expatriés en colère, ce sont des sanctions qui attendent le dictateur dans la patrie de la liberté… 

    

Sacha Baron Cohen a réussi à s’imposer en quelques années comme l’un des humoristes internationaux les plus provocateurs et jusqu’au boutiste qui soit. Sa passion ? Confectionner des personnages extrêmes complètement barrés avec lesquels il prête corps avec une conviction et une volonté assez hallucinante, allant jusqu’à faire la promotion de ses films en restant dans ces rôle et non pas en redevenant l’acteur qui les incarne. Des shows et des campagnes marketing réglés au millimètre, d’une réelle efficacité mais ayant toujours un arrière-gout assez décevant car toute cette folie n’est en fait que très préparée.

Bien qu’il parvienne à donner une apparence de spontanéité et d’improvisation à ses interventions provocatrices, le mythe Sacha Baron Cohen a une certaine tendance à tourner un peu vite en rond, le moteur de cette machine à buzz finissant par ronronner tranquillement tant cette dernière est parfaitement huilée. Après le choc, assez inattendu en son genre, qu’avait constitué Borat, film où Cohen devenait un reporter kazakh, l’acteur humoristique à performances avait enchainé sur Brüno, caricature volontairement outrancière d’un « top model autrichien gay ».  Ajoutons à cela qu’il avait aussi auparavant interprété Ali-G, une vulgaire figure du rap. Mais ses performances au box office ne font que décroitre et il devient rapidement aisé de savoir pourquoi ce « système Baron Cohen » commence à montrer ses limites. The Dictator inquiétait déjà dans ce sens puisque Cohen se relançait à nouveau dans l’interprétation permanente d’un nouveau personnage excentrique et étranger visant encore à montrer les failles d’un système américain qu’il dérègle par son simple passage. Alors ce Dictator est-il une redite inutile ou bien annonce-t-il un renouvellement bienvenu ?

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/84/77/28/20133671.jpgRébellion

Un peu des deux au final. Du point de vue du film lui-même, The Dictator surprend plutôt dans le bon sens du terme avec l’abandon total dès le premier quart d’heure de ce format de faux documentaire qui affaiblissait parfois Borat ou Brüno, certaines séquences drôles n’ayant eu parfois aucune autre justification scénaristique que de faire rire pendant cinq minutes sans faire avancer le film plus que ça. Ici, la structure du scénario est davantage narrative. On suit une histoire et un personnage en étant plus directement impliqué. Un revirement assez classique donc, mais réussi. Changement aussi dans la tonalité de l’humour puisque celui-ci est un peu moins « trash » et vulgaire que dans les deux précédents opus ; ce qui est d’autant plus surprenant lorsque l’on sait le sujet de The Dictator qui pouvait pourtant donner lieu à tout un tas de blagues et de situations véritablement de « mauvais goût ».

Hormis une séquence d’accouchement assez tordue, d’autant plus qu’elle dure, et de quelques pointes un peu salaces, l’humour est relativement retenu. D’ailleurs, il n’est pas toujours d’une efficacité à toute épreuve puisqu’un certain nombre de « chutes » ne fonctionne pas tout à fait. Il est même assez prévisible voire parfois un peu trop répétitif. S’il y a bien quelques séquences d’anthologie, parmi lesquelles on comptera la scène de l’accouchement ou encore l’hilarante scène dans l’hélicoptère (les deux meilleures du film), la plupart du temps, le long-métrage ne surprend pas. Il apparait même comme assez moralisateur sur la fin avec un discours visant à montrer que l’Amérique est très loin d’être la démocratie qu’elle entend prôner dans le reste du monde. Sur une séquence similaire, Michel Hazanavicius avait fait bien plus percutant dans OSS 117 Rio ne répond plus avec l’excellente et maligne réplique sur la « France du général De Gaulle ».

The Dictators’accompagne aussi de quelques caméos plus ou moins savoureux, mais la véritable star du film reste évidemment Sacha Baron Cohen. De quasiment tous les plans puisque même l’un de ses antagonistes est un sosie du général Aladeen, Sacha Baron Cohen compose un personnage à la fois complexe, ambigu et contradictoire. Celui-ci doit faire face à son oncle traitre incarné par un très drôle Ben Kingsley ; l’Histoire nous a depuis longtemps montré que les jeunes souverains doivent toujours se méfier de leurs oncles paternels qui n’aiment pas être mis à l’écart de ce pouvoir qu’ils auraient pu obtenir s’il n’y avait pas eu ces embarrassants neveux.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/84/92/85/20096407.jpgDémocratisation

Pourtant ce général Aladeen ne semblait pas démériter en termes de cruauté par rapport à son oncle-conseiller fourbe. Au contraire même, et tout l’intérêt du film se trouve dans ce retournement de situation par rapport aux codes du genre. D’habitude, le jeune roi/prince/dirigeant se fait renverser par un prétendant traitre plus avide et intéressé. Ce dernier s’acharne alors à se donner plus de richesses et plus de pouvoir au détriment d’un pays ou d’un royaume qui sombre dans la dictature au fur et à mesure que le peuple se voit privé de ses droits élémentaires afin de permettre le train de vie outrancier de son nouveau dirigeant. Mais quel est le but « machiavélique » de l’oncle dans The Dictator ? Instaurer une démocratie et donner plus de richesses à son peuple. Un retournement intéressant qui voit la démocratie être cette nouvelle menace que ce Dictateur perçoit comme le pire et le plus dangereux des régimes.

Evidemment et malheureusement, le film de Larry Charles ne va pas au bout de sa logique puisque même cet oncle cache en fait d’autres objectifs et est moins intéressé par une démocratie que par l’ouverture des frontières aux multinationales afin de piller les ressources de l’Etat qu’il dirige et recevoir en contrepartie un énorme chèque lui permettant d’acheter la villa voisine de celle de George Clooney au bord du lac de Côme. Et pendant ce temps, le dictateur, ayant perdu son « identité » en même temps qu’on lui a dérobé sa longue barbe (Cohen file ainsi un bon coup de pied dans les visions stéréotypés des occidentaux vis-à-vis de leurs « voisins »), découvre les bienfaits de l’égalité, de l’engagement, de la révolte et de la liberté en la personne de Zoe, jeune propriétaire d’une épicerie bio altermondialiste où ne travaillent que des réfugiés politiques. Un havre de paix et d’amour qui, paradoxalement, fonctionnera un tantinet mieux grâce aux méthodes totalitaires mais plus encadrées d’Aladeen.

Mais rien n’est évidemment très sérieux dans The Dictator. La preuve d’ailleurs avec ce dirigeant de pacotille plus bête que méchant qui, face à l’opposition et à la résistance tellement bien organisées de son pays, n’a en fait jamais réussi à véritablement exécuter un ennemi du régime ; une terrible désillusion pour lui lorsqu’il découvre la vérité en entrant par mégarde dans un restaurant pour les opposants au régime d’Aladeen. Le jeune général avouera ensuite plus tard ne pas vouloir marcher sur les pas de son tyran de père et refuser sa destinée de dictateur suprême. Les rares personnes qui l’approchent sont ceux qui font parti de sa servile escorte personnelle ; les autres ne pouvant être soit que des rebelles terroristes cherchant à l’assassiner, soit d’aguichantes starlettes (souvent américaines pour accentuer le paradoxe Aladeen) attirées dans son palais en échange de quelques luxueux pots de vin. Constamment à la recherche d’un inoffensif câlin, Aladeen ne trouvera le réconfort que chez cette Zoe qui acceptera enfin de le prendre dans ses bras. Elle lui permet aussi de libérer son esprit, de ne plus (trop) être un enfant, de voir ses erreurs de jugement et de comportement ; cet apprentissage se concluant pour lui par une surréaliste découverte de la masturbation.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/84/77/28/20133666.jpgPacification

L’histoire d’amour est assez clichée et suit rigoureusement les règles du genre. C’est un peu le problème général de The Dictator. On a l’impression de voir une comédie dont l’ambition initiale est de se démarquer du reste de la production avec une liberté de ton assez forte et un refus ouvert du politiquement correct avant de se retrouver quand même devant un long-métrage terriblement classique et sage. Sa structure narrative est éculée, ses gags ont déjà été pour la plupart rabâchés par d’autres et le film de Larry Charles est vraiment à la traine d’un point de vue technique par rapport à certains de ses concurrents. On ne peut lui enlever une certaine efficacité au niveau des zygomatiques, mais au niveau strictement empathique et moral The Dictator reste très inégal, à mille coudées en dessous d’une (vieille) comédie politique comme Le Dictateur de Chaplin par exemple (ce dernier est d’ailleurs plus pertinent et d’actualité que le long-métrage de Charles), et ce, même s’il essaye de temps à autres à donner de l’épaisseur à son personnage principal.

Reste qu’il est d’une certaine et louable équité lorsqu’il s’agit de taper et d’égratigner l’image de tout le monde. L’intrigue elle-même est très fragile puisqu’elle se limite à n’être qu’une succession de situations surprenantes  devant permettre au final à « l’antihéros » d’évoluer tout en reprenant sa place d’antan. Et la séquence finale donne un arrière-gout de « tout ça pour ça » : rien n’a vraiment changé, ou si peu, mais cela n’a pas d’importance puisqu’encore une fois tout ça n’est pas bien sérieux (en plus du fait que la conclusion enchaine quelques unes des blagues les plus prévisibles et ratées du long-métrage alors que l’introduction était si hilarante, notamment grâce à une dédicace au décédé Kim Jong-il). The Dictator est un film un peu vain sur les bords malgré des intentions louables au départ. Un parfait représentant du ralentissement du « système Sacha Baron Cohen ».

Il faudrait un peu plus que ça pour relancer le comédien dont les performances au box office, notamment sur le territoire américain, ne font que s’amenuiser fortement. S’il a déjà livré des interprétations plutôt convaincantes dans des rôles secondaires dans des films mineurs de Tim Burton (Sweeney Todd) et de Martin Scorsese (Hugo Cabret), ce renouvellement qui pourrait être en adéquation avec la nature de caméléon de l’acteur comique devrait être son rôle de Freddy Mercury, leader du groupe « Queen », dans le biopic de Stephen Frears, metteur en scène de The Queen (ça ne s’invente pas). Mais connaissant le côté jusqu’au boutiste de l’acteur, on peut déjà être assuré sur l’intensité de cette performance

NOTE :  6,5 / 10

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